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La question dite de la décarbonation s’est officiellement invitée dans les débats politiques au début des années 2000, mais la science et la technologie n’évoluent pas selon la même chronologie Pour la question du changement climatique d’origine anthropique a été identifiée par les scientifiques dès le 19e siècle, période pendant laquelle l’industrialisation basée sur des technologies alimentées par les énergies fossiles commence. Le 20e siècle a été pour sa part à la fois marquée par la poursuite de cette trajectoire en termes d’industrialisation, mais aussi par la création d’institutions internationales (telles que les COP, le GIEC) pour limiter les émissions de CO2. Pour limiter le changement climatique et ses conséquences économiques, sociales et humaines qu’il provoquera, le mot d’ordre est de « décarboner », donc réduire les émissions de carbone. Mais, la réalité est beaucoup plus complexe.
Notre étude porte sur les débats parlementaires relatif au projet de loi « climat et résilience » qui entend réduire l’empreinte carbone. Elle vise à décrire et analyser les divers dispositifs symboliques, les référents idéologiques mobilisés par les parlementaires, les argumentaires développés à propos de la volonté de décarbonation que souhaite mener le gouvernement dans le cadre dudit projet de loi en centrant notre étude sur les discussions générales. La droite et la majorité gouvernementale structurent leur discours autour de la pensée libérale fondée sur efficacité économique, la décentralisation, l’acceptabilité des mesures. L’extrême droite développe une conception de l’écologie nationaliste basée sur un localisme ancestral. A gauche, on trouve une conception de l’écologie centrée sur l’idée de justice sociale, bien qu’à géométrie variable. Derrière l’unanimisme face à l’urgence climatique se cachent en réalité des différences notables dans les conceptions de la décarbonation des différents groupes parlementaires.
L’industrie sidérurgique est l’une des plus polluantes au niveau mondial. En France, ArcelorMittal Dunkerque est la première unité industrielle d’émission de CO2 et à ce titre bénéficie d’importants soutiens publics. En 2022, l’entreprise a annoncé un important programme de décarbonation pour fabriquer de l’acier vert grâce à différentes technologies (unité de réduction directe, four électrique, etc.). Entre juillet 2023 et septembre 2024, nous avons interrogé des managers responsables du programme de la décarbonation et des représentants syndicaux afin de connaitre leur position respective sur cette question et analyser le rôle accordé aux syndicats et aux salariés dans ces transformations technologiques. Il en ressort une certaine convergence de vue entre les deux parties sur cette question. Cependant, l’organisation syndicale considère que la place des salariés est minorée, que la décision d’investissement retard et que la survie de l’usine est en jeu.
La transition vers une économie décarbonée représente un défi majeur pour les syndicats. Cet article identifie et analyse les stratégies par rapport à la décarbonation adoptées par les syndicats européens dans l’industrie manufacturière et le secteur de l’énergie. Sur la base d’entretiens et d’une analyse de documents, notre étude identifie en particulier trois types de stratégies adoptées par les syndicats européens dans les secteurs étudiés : (1) le refus des mesures de décarbonation ; (2) les stratégies ambiguës visant à retarder et/ou à minimiser la réglementation ; (3) le soutien proactif aux mesures de décarbonation. Ces stratégies syndicales trouvent principalement leurs fondements dans les intérêts sectoriels liés à l’emploi, mais aussi dans les orientations idéologiques des organisations syndicales et leurs conceptions de la démocratie syndicale.
La prise en compte des données temporelles dans la réduction des émissions anthropiques de gaz dans l’atmosphère accentue les conséquences imprévisibles du changement climatique. En effet, les énergies fossiles émet-tent différents gaz dont le CO2 et le SO2. Ce dernier refroidit le climat, mais les durées de vie de ces deux gaz sont très différentes : plus d’un siècle pour le premier, moins de deux semaines pour le second. La défossilisation de l’énergie rend plus probable un emballement du réchauffement. La réduction au plus vite des émissions anthropiques de méthane (CH4), appuyant la thèse de la décarbonation dans toute sa diversité, est une solution. Elle requiert des innovations techniques, institutionnelles et sociétales, lesquelles nécessitent une appropriation citoyenne. L’apport de la démocratie technique par ses forums hybrides prolongés par l’approche en recherche action participative liant recherches de plein air et recherches confinées peut être déterminant.
La décarbonation et l’économie circulaire sont généralement appréhendées comme les solutions pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et le réchauffement climatique. Dans les faits, ce n’est pas si simple. L’économie circulaire qui consiste à collecter et valoriser des biens de consommation usagés est un moyen non de réduire la production de déchets, mais au contraire de l’accroire, puisque les déchets ainsi collectés sont appréhendés comme des ressources. L’économie circulaire est cependant indispensable (selon certaines conditions) pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, et plus encore dans une optique de décarbonation. Les énergies renouvelables (solaire, éolien notamment) nécessitent l’exploitation de ressources minières. Mais, l’exploitation de nouvelles mines est source de production de gaz à effet de serre. Pour rompre ce cercle vicieux, il faut revoir notre modèle de production et de consommation.
Les réserves publiées de pétrole et de gaz sont suffisantes pour saturer le budget carbone publié par le GIEC. Nous semblons être dans la perspective, soit d’un climat emballé faute d’arrêter l’extraction des produits carbonés à temps, soit de pertes aux conséquences économiques guère prévisibles dues à l’échouage considérable d’actif carbonés, qu’une réglementation devenue existentielle contraindrait. Pour y faire face, le présent article propose de mettre en place au plus vite une procédure comptable au sein des entreprises alimentant la chaine énergétique carbonée. Elle consiste en une provision prévoyant le remplacement des actifs consacrés au énergies carbonées. Financée dès sa mise en place, elle assurera la décarbonation des décisions d’investissement, en amont. Au sein des comptes annuels des industries productrices de pétrole, de gaz et de charbon, la nécessité de remplacer les actifs associés aux énergies dépendantes du carbone d’origine fossile sera ainsi actée en son coeur. Invitant la fourniture en temps opportun du capital nécessaire pour éviter l’échouage, la provision sera calculée selon une valeur comptable énergétiquement équitable des actifs ainsi destinés à être remplacés… à temps. Dans un contexte où les technologies d’énergies propres sont avides de financement, où le système de quota d’émission donne manifestement des signaux insuffisants aux investisseurs, mais où des précédents d’investissement sont malgré tout inspirants, on aborde les éléments clefs visés par notre procédure, dont son efficacité en capacité convertie, comblant - à temps ? - le besoin en énergies propres, son attractivité pour les investisseurs… et la disponibilité financière. Il faudra en dessiner la feuille de route avec la participation de gouvernances internationales juridiques et financières dont nous justifions la liste.
Cet article propose d’explorer la décarbonation comme catalyseur de la transformation industrielle, en examinant les tensions entre la nécessité de réindustrialiser les territoires et la prise en compte des enjeux environnementaux. À travers l’exemple de la reconversion du site de Renault à Flins, dans le département des Yvelines, en usine d’économie circulaire, il met en lumière les défis et les opportunités liés à cette évolution, tout en soulignant l’importance de comprendre les mécanismes complexes qui régissent les interactions dans ce nouvel écosystème.
Cet article questionne la décarbonation comme vecteur de transformations systémiques au prisme du concept de cluster. Il examine les interactions entre innovations technologiques et nouvelles ressources autour de l’EIT, mais aussi entre innovations sociales, enjeux environnementaux et nouveau projet de territoire, dans un contexte associant la réindustrialisation aux objectifs climatiques. À travers le complexe industrialo-portuaire de Fos-Étang de Berre, au sein de la métropole Aix-Marseille-Provence, décarbonation des industries existantes et nouvelles implantations bas carbone révèlent les défis d’une structuration collective associant monde industriel, acteurs publics et société civile dans une dynamique de transitions multiples.
2025
Volume 25- 10
La décarbonation : industrie, économie et politique2024
Volume 24- 9
Les filières de production dans la bioéconomie2023
Volume 23- 8
Intelligence artificielle et Cybersécurité2022
Volume 22- 7
Trajectoires d’innovations et d’innovateurs2021
Volume 21- 6
L’innovation collaborative2020
Volume 20- 5
Les systèmes produit-service2019
Volume 19- 4
L’innovation agile2018
Volume 18- 3
Innovations citoyennes2017
Volume 17- 2
Innovations de mobilité. Transports, gestion des flux et territoires2016
Volume 16- 1
Stimulateurs de l’entrepreneuriat innovant