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Adrien Gonnet
Inrap Grand Est
Vincent Riquier
Inrap Grand Est
Publié le 22 octobre 2025 DOI : 10.21494/ISTE.OP.2025.1383
Si l’approche géoarchéologique d’un site se concentre habituellement sur les zones de stockage sédimentaire telles que des vallons secs ou les structures anthropiques en creux pour appréhender les archives du sol, les axes viaires ou les dépressions naturelles de types thermokarstiques peuvent, elles aussi, constituer une source d’information pour le pédologue et le géomorphologue. Ainsi, le site de Faux-Fresnay « Le Haut des Taupinières », fouillé par l’Inrap en 2019 sur une superficie de 10 hectares, offre des perspectives nouvelles pour documenter les grandes phases de pédogenèse et les troncatures des sols, notamment à travers la présence d’un axe viaire médiéval, ayant préservé les horizons de rendosol holocène. Ce rendosol, également conservé à la faveur d’un vallon sec et de dépressions thermokarstiques hérités du Pléistocène, est anthropisé dès l’âge du Bronze puis subit, comme l’ensemble du site, une érosion polyphasée et diachronique. Les produits d’érosion stockés dans les dépressions thermokarstiques subissent régulièrement une reprise de pédogenèse, suggérant une rythmicité du couple érosion/sédimentation et la succession de périodes de stabilité et d’instabilité des sols. Pour caractériser la pédogenèse holocène et les différentes phases d’érosion du site, l’étude géoarchéologique s’appuie donc à la fois sur la réalisation de transects pédostratigraphiques, sur des analyses géochimiques (dosage de la matière organique et des carbonates), mais aussi sur les datations relatives offertes par les structures, fossoyées ou non, préservant ces horizons pédologiques à titre d’archives du sol. Ces structures anthropiques et les datations relatives qu’elles fournissent mettent notamment en lumière une première phase érosive postérieure à l’occupation du Bronze final à Faux-Fresnay, puis une accélération des processus érosifs au cours de la seconde moitié du Subatlantique, en lien avec l’agriculture mécanisée. L’utilisation des axes viaires anciens comme témoin des périodes d’érosion/sédimentation à l’échelle régionale peut également être étendue à d’autres contextes archéologiques, géomorphologiques et pédologiques. Ainsi, une remise en contexte à l’échelle régionale est possible à travers d’autres exemples d’axes viaires plus récents, parfois modernes à contemporain, ayant préservé les sols anciens et qui témoignent d’une morphogenèse colluviale accélérée depuis plus d’un demi-siècle.
While the geoarchaeological approach of a settlement usually focuses on sedimentary storage areas such as dry valleys or anthropogenic structures to understand the soil archives, roadways or natural thermokarst-type depressions can also be a source of information for pedologists and geomorphologists. Thus, the Faux-Fresnay site “Le Haut des Taupinières,” excavated by the French National Institute for Preventive Archaeological Researches (INRAP) in 2019 over an area of 10 hectares, offers new perspectives for documenting the major phases of pedogenesis and soil truncations, particularly through the presence of a medieval road axis that has preserved the Holocene rendosol horizons. This rendosol, also preserved within a dry valley and thermokarst depressions inherited from the Pleistocene, has been occupied by human societies since the Bronze Age and, like the rest of the site, has undergone multiphase and diachronic erosion. The colluvium stored in the thermokarst depressions regularly undergo renewed pedogenesis, suggesting a rhythmicity of erosion/sedimentation processes and a succession of periods of soil stability and instability. To characterize Holocene pedogenesis and to evaluate the different phases of erosion at the site, the geoarchaeological study is based on pedostratigraphic transects, geochemical analyses (measurement of organic matter and carbonates), and relative dating provided by anthropogenic structures, whether excavated or not, preserving these soil horizons as soil archives. Those anthropogenic structures and the relative dating they provide highlight, in particular, an initial phase of erosion following the Late Bronze Age occupation at Faux-Fresnay, followed by an acceleration of erosion processes during the second half of the Subatlantic period, linked to mechanized agriculture. The use of an ancient roadway as evidence of periods of erosion/sedimentation on a regional scale can also be extended to other archaeological, geomorphological, and pedological contexts. Thus, it is possible recontextualize these events at regional scale through other examples of more recent, sometimes modern to contemporary, roadways that have preserved ancient soils and bear witness to accelerated colluvial morphogenesis over more than half a century.
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